«Nous avons bu tant de rosées

En échange de notre sang

Que la terre cent fois brûlée

Nous sait bon gré d'être vivants.» 

 

« Non dû mais don

Mais abandon

A l'endurance à la durée

D'où l'abondance inespérée

Tout don de vie abonde en don.»

François Cheng, Le livre du vide Médian, Albin Michel, 2002

 Il y a là un mystère qui s'offre en toute fraternité. A chacun de creuser, d'y trouver sa place. 

Entre le souffle yang et le souffle yin, intervient le souffle du vide médian, qui les élève idéalement vers une transformation bienfaisante. C'est dans cet «entre-deux» que le vivant peut accéder à une présence authentique au monde. Médités à cette lumière, les mots de Cheng acquièrent leur dimension véritable. Et l'on se souvient que lors de sa naturalisation française, en 1971, l'écrivain choisit le prénom de François, comme un signe au saint d'Assise, «le saint d'Occident seul capable d'unir nature et grâce, celui qui chante l'eau et le feu». L'ultime poème de l'ultime page vaut testament à lui seul. C'est la parole d'un homme qui consent. Non pas enfin, mais encore et pour toujours, toute souffrance et toute joie bues.

Miracle
Lorsque par-dessus l'abîme qui sépare

Resplendit l'étoile de la prime étincelle
Lorsque par-delà la nuit des temps morts

Le cauchemar éclôt en rose-thé du jour
Lorsque jamais entendus, les appels vains

Se transmuent enfin en murmures ininterrompus
Miracle cette vie qui s'offre

Tout de consentement et d'entendement 

entre les mains, entre les lèvres
Laisse-toi traverser par le souffle inouï

par le pur souffle du oui!

«Je suis prêt à affirmer que c'est dans le langage que réside notre mystère»

 


« La vraie passion c'est une quête, pas une impulsion, un emportement, un instinct de chasseur », dans Le Monde - 15 Février 2002
« La passion charnelle reste la plus haute forme de quête spirituelle. Elle est un aperçu d'éternité. » dans Cyberpresse - 15 Mars 2002

« Sur terre, seule l'écriture permet de tendre vers le tout de son vivant. » dans Cyberpresse - 15 Mars 2002

 
« N'oubliez pas, on vit juste pour quelques rencontres. » dans Cyberpresse - 15 Mars 2002

«Le véritable réel ne se limite pas à l'aspect chatoyant de l'extérieur» dans Cyberpresse - 15 Mars 2002


« L’individu a toujours connu son épanouissement grâce à ces rencontres successives avec l’extérieur. » 13 Avril 1999

« La vraie passion c'est une quête, pas une impulsion, un emportement, un instinct de chasseur. » dans Le Monde - 15 Février 2002

"Tous les Chinois depuis deux ou trois générations ont un double destin, personnel et collectif. Depuis un siècle, pas un Chinois n’a pu échapper au drame national. Pas une famille qui n’ait connu de séparation et n’ait été impliquée dans un mouvement malgré elle. Nous portons en chacun de nous un destin collectif et nous avons l’impression de connaître de ce fait tous les destins. Je vis en France depuis 1948, je suis retourné dans mon pays pour la première fois en 1984, mais en réalité, je n’ai jamais quitté la Chine. Au contraire, je suis profondément lié à cette culture, à ces destins, à tous les faits historiques et humains. (...) 

Après 1979, quand la Chine s’est ouverte, beaucoup de Chinois qui ont pu se rendre en France sont venus me voir et m’ont raconté. J’étais une sorte de réceptacle. J’ai intériorisé tous ces récits. (...) 

Je suis arrivé en France à vingt ans pour étudier la peinture occidentale. J’ai été très jeune fasciné par la culture de l’Occident. J’étais enfant quand j’ai découvert des reproductions de tableaux du Louvre, des nus d’Ingres. A quinze ans, j’ai dévoré "Les Nourritures terrestres". En France, j’étais boursier pendant deux ans. La plupart des étudiants chinois qui étaient venus avec moi sont repartis. Je pensais moi aussi retourner dans mon pays. Mais, en 1954, s’est développée dans la Chine nouvelle une campagne contre les écrivains. Un ami, celui du livre, le poète Haolang, était persécuté. J’ai compris que quelque chose s’était cassé, que je ne pouvais plus revenir chez moi. J’ai pris alors conscience de l’exil. Jusque-là, je n’étais qu’un étudiant à l’étranger. Je suis devenu un immigré, que l’on pouvait regarder avec mépris, avec la conscience d’une solitude totale, poursuivi par une sorte d’interrogation métaphysique sur moi-même : qui suis-je ? Pourquoi suis-je si loin de ma terre natale ? Quel est ce destin absurde ? A cette époque je parlais très mal le français. J’ai rencontré Eluard, Pierre Abraham, mais je ne pouvais pas écrire correctement votre langue. J’ai beaucoup voyagé en Europe, en Amérique, je suis devenu un pèlerin de l’Occident. Peu à peu j’ai transcendé mon attachement à la Chine et j’ai trouvé ma voie, celle de l’esprit grâce à de grands intellectuels français, Barthes, Julia Kristeva, Lacan, Lévi-Strauss... Ils m’ont incité à élargir le champ de mes études sur la culture chinoise, sur la poésie et la peinture, mais avec la méthode des structuralistes. J’ai appris que la vie était faite de rencontres et de confiance. J’ai commencé à vivre en symbiose avec les deux cultures. Le déchirement que je connaissais a fait place à une sorte d’épanouissement intellectuel." François Cheng pour le journal L’Humanité



Oeuvres de François Cheng Chu Ta Shi Tao  Biographie Bibliographie


Accueil site  Peinture chinoise